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« L’événement » d’Annie Ernaux

J’ai eu envie de découvrir l’écriture d’Annie Ernaux à l’occasion de la sortie du film « L’événement » adapté de son roman du même nom. Je voulais surtout lire le livre avant de voir le film…

Pour commencer : 2 mots sur Annie Ernaux, née en 1940 en Normandie dans un milieu modeste, est une femme de lettres et professeure de lettres. Son œuvre littéraire, pour l'essentiel autobiographique, entretient des liens étroits avec la sociologie. Elle revendique une écriture neutre, « sans jugement, sans métaphore, sans comparaison romanesque », et évoque un style « objectif, qui ne valorise ni ne dévalorise les faits racontés », cherchant ainsi à « rester dans la ligne des faits historiques, du document ». En clair, elle tente d'écrire sur la langue du monde ouvrier et paysan normand qui a été le sien jusqu'à ses dix-huit ans, je la cite :« Ce qui m'importe, c'est de retrouver les mots avec lesquels je me pensais et pensais le monde autour ».

C’est aussi le cas dans le roman « L’événement » où elle essaie de nous retranscrire comment elle a vécu son combat pour avorter en 1963 lorsqu’elle était étudiante à Rouen, quatre ans avant la légalisation de la pilule contraceptive et douze ans avant la Loi Veil. C’est son expérience individuelle qui est racontée (à l’aide de son journal intime de l’époque), pour utiliser les mêmes mots qu’au moment des faits. Ainsi l’auteure elle-même ressent les mêmes émotions qu’elle a ressentie auparavant. C’est un combat qu’elle n’a pas été la seule à vivre et ce roman lui sert aussi à éclairer historiquement et socialement sur la condition des femmes dans les années 60.

C’est de cette façon qu’elle a une démarche sociologique qui tente de « retrouver la mémoire de la mémoire collective dans une mémoire individuelle. Elle utilise parfois un langage cru et violent qui bouscule un peu mais personnellement c’est ce que j’aime dans l’écriture. J’aime son point de vue littéreaire : raconter des faits pour faire réfléchir. Evidemment le roman pose la question fondamentale : est-ce que l’avortement était interdit parce que c’était mal, ou si c’était mal parce que c’était interdit ? Et nous pouvons encore nous la poser quand on voit qu’aux USA ce vendredi 24 juin l’avortement a été interdit instantanément dans treize États.

Laura